Les dispositions relatives à la rupture du contrat de l’Agent Commercial prévoient expressément l’obligation pour l’Agent Immobilier de régler à l’Agent Commercial une indemnité de fin de contrat en cas de rupture du contrat à son initiative.
Cette indemnité est toutefois exclue dans l’hypothèse où la rupture du contrat de l’Agent Commercial par l’Agent Immobilier serait la conséquence d’une faute grave imputable et imputée à l’Agent Commercial.
Qu’est-ce qu’une faute grave selon la jurisprudence ?
Pour rappel, la jurisprudence établie en la matière considère désormais que la faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité du contrat et qui présente une gravité telle qu’elle rend impossible le maintien du lien contractuel.
La faute grave, dès qu’elle est connue de l’Agent Immobilier, doit donc être dénoncée et notifiée à l’Agent Commercial sans délai, à défaut de quoi il est rappelé, de façon régulière et constante, que la connaissance de manquements graves non dénoncés constitue une tolérance de la part de l’Agent Immobilier qui exclut donc tout caractère de gravité de la faute ou du grief qui serait ensuite être reproché à l’Agent Commercial à la cessation du contrat.
Ainsi, un Agent Immobilier ne peut se prévaloir d’un éventuel manquement ou grief qu’il reprocherait à l’Agent Commercial s’il en a eu connaissance, l’a accepté et l’a toléré pendant plusieurs mois, sans émettre aucune remarque ni observation et sans lui demander de cesser ce manquement ou d’y remédier.
L’arrêt d’une Cour d’Appel en matière de faute grave
Une Cour d’Appel a rendu un arrêt intéressant en matière de faute grave.
L’Agent Commercial avait, en cours d’exécution du contrat, distribué des produits concurrents à son mandant, sans obtenir son consentement.
Le mandant, qui avait connaissance de cette distribution de produits concurrents par l’Agent Commercial, pendant l’exécution du contrat, n’a toutefois fait aucune remarque ni observation, et n’a aucunement dénoncé le contrat dès connaissance de cette faute qui, sur le principe, constitue un manquement grave de l’Agent Commercial à ses obligations de loyauté et de bonne foi à l’égard de l’Agent Immobilier.
L’Agent Immobilier n’a alors invoqué ce grief que plusieurs mois après, à l’occasion de la rupture du contrat, pour tenter d’échapper au paiement de l’indemnité compensatrice de rupture du contrat due à l’Agent Commercial.
La connaissance par l’Agent Immobilier d’un grief caractéristique d’une faute grave, laquelle en l’occurrence n’était pas contestée dans sa gravité, excluait toute possibilité de priver l’Agent Commercial de son droit à indemnité dans la mesure où cette connaissance et l’absence de contestation et d’observation sur le grief, en l’occurrence la distribution de produits concurrents, constituaient une tolérance qui exclut toute gravitée du manquement invoqué.
Pour rappel
Il convient de rappeler qu’il est extrêmement important, en cas de représentation d’un Agent immobilier concurrent, ou de produits non concurrents mais pour une agence immobilière pouvant distribuer d’autres produits ne faisant pas l’objet du contrat mais concurrents, de respecter les clauses contractuelles éventuellement prévues au contrat d’Agent Commercial, et, à défaut, d’en aviser préalablement l’Agent Immobilier pour éviter tout reproche et tout grief de manquement à une obligation de loyauté et ainsi toute « faute grave ».
Même dans l’hypothèse d’une faute grave, comme celle de la connaissance et ainsi la tolérance de l’Agent Immobilier privent le manquement invoqué de tout caractère de gravité, et permet ainsi à l’Agent Commercial de revendiquer son droit à indemnité compensatrice.
Il ne s’agit ainsi pas d’inciter l’Agent Commercial à distribuer des produits concurrents, à manquer à ses obligations de loyauté et de bonne foi, ou à violer ses obligations contractuelles, au seul motif qu’une connaissance et une tolérance de l’Agent Immobilier, ne lui permettraient pas d’être privé de son indemnité compensatrice.
Dans une telle hypothèse, il conviendrait de pouvoir rapporter la preuve expresse, d’une part de la connaissance de l’Agent Immobilier de ce manquement, qui serait invoqué comme faute grave pour justifier de la rupture du contrat et de l’absence de paiement de l’indemnité de fin de contrat, d’autre part de déterminer la durée sur laquelle ce manquement s’est exécuté, ce afin de pouvoir prouver le critère essentiel à savoir la tolérance de l’Agent Immobilier, car une connaissance sur une période de quelques jours ne peut caractériser une « tolérance ».
Par conséquent, la prudence reste toujours conseillée et il convient de respecter les obligations d’information, de loyauté et de bonne foi, qui incombent tant à l’Agent Commercial qu’a l’Agent Immobilier dans le cadre de l’exécution du contrat.