Une décision inédite de la Cour de cassation
La Cour de cassation a rendu un arrêt :
Le non-respect de la réglementation Tracfin peut être considéré comme une faute de concurrence déloyale.
Cette décision ouvre de nouvelles perspectives juridiques et interpelle directement les professionnels de l’immobilier soumis à ces obligations.
I – TRACFIN : Quand le non-respect devient une faute concurrentielle
Les faits
Une entreprise est poursuivie par un concurrent pour non-respect des obligations de lutte contre le blanchiment (LCB-FT). Le concurrent réclame la communication de pièces en vue d’une action en concurrence déloyale, au motif que ne pas respecter Tracfin donne un avantage économique indu.
La Cour valide cette logique :
« Le non-respect des obligations LCB-FT (articles L.561-1 et suivants du Code monétaire et financier) entraîne des économies indues et fausse la concurrence. »
Conséquence pour les professionnels de l’immobilier
- Respecter Tracfin a un coût : formations, procédures, documents.
- Un professionnel qui s’en exonère bénéficie d’un avantage injuste.
Ainsi, un agent immobilier qui ne respecte pas ses obligations Tracfin pourrait être poursuivi par un concurrent sur le terrain de la concurrence déloyale.
II – Et si d’autres manquements devenaient aussi fautifs ?
Un professionnel qui ne respecte pas d’autres obligations légales (ex : formation ALUR, assurance RCP, etc.) pourrait-il être accusé de concurrence déloyale ?
Par exemple :
- Un agent qui ne forme pas ses collaborateurs économise du temps et de l’argent.
- Cela peut être perçu comme un avantage concurrentiel illégal.
Cela renforce l’importance du respect de toutes les obligations légales, non seulement face à l’administration, mais aussi face aux concurrents qui peuvent engager des actions.
III – Le rapport Tracfin : chiffres clés et obligations renforcées
Le rapport annuel LCB-FT 2022, publié en octobre 2023, propose une présentation renouvelée pour aider les professionnels. Il est une base précieuse pour votre obligation de formation continue.
Partie 1 : Bilan des déclarations
- 48 professions assujetties à Tracfin, dont les agents immobiliers.
- En 2022, 440 déclarations de soupçon dans l’immobilier (+29 %).
- Cela reste peu par rapport au nombre de transactions annuelles.
Partie 2 : Utilisation des données
Le rapport détaille les usages des déclarations :
- Signalements à la DGSI, à la DGFiP, aux juridictions, à l’administration…
- Objectif : montrer que vos signalements ont un réel impact.
Partie 3 : État de la menace
Nouvelle section opérationnelle, elle fournit :
- Une synthèse des critères d’alerte,
- Un abécédaire de 29 cas types, avec schémas de fraude et critères à surveiller,
- Des fiches par profession : pour l’immobilier, consultez les fiches 5, 13, 14, 15 et 22.
Utilisez ces fiches comme support pédagogique pour vos formations internes.
Ce qu’il faut retenir et faire
Les obligations Tracfin ne se limitent pas à une simple déclaration :
- Mise en place d’un dispositif de gestion des risques,
- Identification du client et du bénéficiaire effectif,
- Connaissance de l’objet de la relation d’affaires,
- Obligation de formation continue pour vous et vos collaborateurs.
La DGCCRF et la Commission nationale des sanctions intensifient leurs contrôles :
- 39 sanctions en 2021,
- 55 en 2022,
- 33 déjà prononcées au 31 juillet 2023.
Publié le 20 février 2024 dans le Journal de l’Agence par Caroline Dubuis-Talayrach, avocat








